Publication le 07 Mai 2019 Quand j'ai su qu'il y aurait une novélisation de la web-série Carmilla, adaptée de la novella de Sheridan Le Fanu, mon cœur a raté un battement. J'adore cette série, j'ai vu toutes les saisons, plusieurs fois, et une fois de plus avant de commencer le livre, et je suis même restée debout au beau milieu de la nuit pour pouvoir voir le film, qui était joué en live streaming cette nuit-là. J'ai précommandé le livre juste avant Noël et je mourais d'impatience d'avoir mon exemplaire à moi entre les mains. Je remercie donc infiniment Kids Can Press et NetGalley de m'avoir envoyé un exemplaire numérique gratuit en échange d'une critique honnête surtout vu que j'ai un peu (beaucoup) démonté le dernier livre qu'ils m'avaient envoyé. Désolée. Malheureusement cette critique ne va pas être beaucoup plus tendre. Je n'ai pas aimé du tout. Je pense qu'un fan de la série trouvera la novélisation médiocre au mieux, tandis qu'un novice la trouvera carrément mauvaise. Dans les deux cas, c'est un epic fail. Carmilla est une super web-série. Comme je l'ai dit, je l'adore, je l'ai vue plusieurs fois et j'étais hyper excitée d'avoir une novélisation, surtout avec une couverture aussi canon. Mais j'avais oublié un truc important: c'est une novélisation. Et comme presque à chaque fois avec les novélisations, l'autrice s'est contentée de retranscrire ce qu'il y avait à l'écran, sans valeur ajoutée. Et mon problème avec ça, c'est pourquoi je devrais lire la retranscription quand je peux avoir exactement la même histoire mais avec des images? Qu'est-ce que la novélisation a que je n'ai pas avec le matériau de base? Ben rien. Absolument rien. On n'a quasiment rien d'autre que du dialogue et des actions, donc ce qui se voit à l'écran. Aucune réelle introspection et très peu de contenu qui n'est pas déjà dans la série. Moi qui espérais que l'intrigue serait étoffée et que l'autrice saisirait l'occasion de mettre en scène le contenu que Laura raconte à sa webcam en plus de ce qui se passe dans la chambre, je suis tombée de bien haut. J'ignore qui est Kim Turrisi, si elle a écrit d'autres romans et si oui, s'ils étaient bons, mais elle s'est sacrément vautrée avec Carmilla. Les personnages caricaturaux passent à l'aise à l'écran, parce qu'ils sont drôles et l'interprétation des acteurs les rend acceptables, mais dans le livre, ça ne passe pas. Laura est geignarde, Carmilla est intolérable, Kirsh est un gros lourd misogyne. La seule qui s'en tire plutôt bien, c'est Danny. L'inconvénient, c'est qu'en plus du fait que les touches d'humour rocambolesque font un bide, les personnages n'ont pas la moindre alchimie entre eux. C'est terrible dans une histoire comme Carmilla, en particulier avec le triangle amoureux Danny-Laura-Carmilla, et dans une histoire de vampires par-dessus le marché. Carmilla devrait suinter la sensualité mais elle est juste désagréable. L'attirance de Laura pour elle est passée presque complètement sous silence pendant une bonne partie du roman, alors que celle qu'elle ressent pour Danny en devient agaçante tellement c'est répété. Il n'y a aucune demi-mesure, on y va au bulldozer quand la subtilité est vitale et tout le second degré de la web-série est pris au sérieux. Au niveau du ton et des personnages, on est passés complètement à côté. Le problème, c'est que quand on enlève le second degré et l'humour potache, ce qui reste est soit problématique, soit impossible à gober. Laura trouve du sang dans une brique de lait pratiquement au début, claire indication que Carmilla est un vampire... et ne fait pas le rapprochement? Et quand Carmilla décide enfin de raconter son histoire, Laura en fait un spectacle de marionnettes pour son blog? Même moi qui ai vu la web-série, j'ai du mal à l'encaisser. Je pense que l'autrice a fait de son mieux pour y rester fidèle, ce qui est louable, mais question réalisme, c'est précisément ce qui l'a desservie. Le passé de Carmilla aurait été bien mieux présenté avec un vrai flashback plutôt que Carmilla qui raconte un des plus grands drames de sa vie avec Laura qui en fait un spectacle de marionnettes. Et si même quelqu'un qui apprécie cet humour absurde dans la série grince des dents à la lecture, je n'ose pas imaginer ce que va penser un lecteur novice, qui n'a jamais vu les épisodes. Sur le papier, une romance vampirique à l'université la plus étrange du monde, ça pourrait donner quelque chose d'épique, alors espérer quelque chose de premier degré et se retrouver avec de l'humour mal retranscrit, j'ai du mal à imaginer à qui ça pourrait plaire. Si je n'étais pas fan de la web-série dès le départ, je ne pense pas que j'aurais atteint ne serait-ce que le quart du livre, parce que même en étant fan, si ça n'avait pas été un exemplaire envoyé pour chronique, je ne l'aurais pas fini. Autre point que j'ai constaté, comme d'autres blogueurs, c'est le traitement de LaFontaine, le personnage genderqueer de la série. Je ne vais pas m’appesantir sur le fait que Perry est incroyablement obtuse et traite LaFontaine vraiment mal en insistant pour l'appeler Susan, surtout après seize ans d'amitié. C'est un problème de la série, pas du livre lui-même, LaFontaine lui balance son étroitesse d'esprit à la tronche et Perry finit par faire des efforts pour changer d'attitude. Par contre, le livre fait plusieurs fois référence à LaFontaine en tant que "she" alors qu'iel utilise le pronom "they", en-dehors des interventions de Perry. Ça arrive plusieurs fois, j'en ai compté cinq, malgré le fait que l'autrice utilise généralement "they", donc je pense que c'est un problème de relecture. Ce n'en est pas moins un problème, mais il ne demande que quelques changements rapides et pas une entière réécriture du livre, donc j'espère que ce sera corrigé avant la publication. Tant qu'on est sur la relecture, je suis tombée sur "an evil frown spreads accross his chiseled jaw". Comment on peut voir un froncement de sourcils sur une mâchoire? Je pense que "frown" devait être "smirk", parce que j'ai beaucoup de mal à visualiser un froncement de sourcils diabolique, même ailleurs que sur la mâchoire. Bref, j'ignore si c'est l'autrice qui a voulu absolument coller à la web-série sans s'en éloigner assez pour proposer quelque chose de plus solide ou si c'est un autre intervenant de la chaine du livre qui l'y a forcée, mais à mes yeux, c'était un très mauvais angle d'approche et le résultat me déçoit énormément. La seule chose que j'ai aimée, c'est la couverture. Ma note 1/10, pour la couverture. Je reconnais volontiers que le matériau de base n'est pas parfait, mais c'était justement l'occasion d'y faire quelque chose. Au lieu de ça, c'est superficiel (limite paresseux), amateur et tout bonnement insupportable. Je conseille plutôt de regarder la web-série, disponible gratuitement sur Youtube, et d'oublier que la novélisation existe. J'ai annulé ma précommande la mort dans l'âme.
0 Commentaires
Laisser une réponse. |
Prochains articles:
White Smoke, de Tiffany D. Jackson.
Nos Jours Brûlés, de Laura Nsafou, en lecture commune avec:
Cadeau Muhayimana Moune La Booktillaise pour le Café Lithéraire Oddball, de Sarah Andersen.
Exemplaire numérique envoyé par Andrews McMeel Publishing (merci à eux!) Catégories
Tous
Archives
Décembre 2022
|