Après Marina, de Carlos Ruiz Zafon, qui a été un véritable coup de cœur pour moi, c'est la France qui est mise à l'honneur, cette fois, avec Les Petites Reines, de Clémentine Beauvais, qui a été choisi comme lecture commune pour le YAinTranslation Book Club. J'ai trouvé que c'était un roman fun dans l'ensemble, mais qu'il manquait un peu de profondeur. Bon, je dois reconnaitre que Les Petites Reines n'est pas un roman que j'aurais acheté de moi-même au vu du synopsis. Trois lycéennes qui partent en road-trip à vélo, ce n'est pas le genre d'histoire qui attire mon attention. Maintenant, sans être impatiente de le lire, je n'étais pas rebutée non plus, donc je l'ai commencé avec l'esprit ouvert et le seul espoir de passer un bon moment. Au niveau de ces attentes particulières, le contrat est rempli. J'en profite aussi pour signaler deux erreurs du synopsis: le palmarès est dans le mauvais ordre, c'est Astrid qui "gagne" (Boudin d'Or), puis Hakima en seconde position (Boudin d'Argent) et enfin Mireille (Boudin de Bronze). La seconde erreur, c'est que Mireille a elle-même contacté une journaliste pour suivre leur périple, donc l'attention des médias n'est pas une complète surprise. Au niveau plausibilité, je suis quand même partie avec un sourcil haussé, parce que laisser partir trois adolescentes seules, à vélo, à travers la France, ... Mouais. L'ajout de Kader au trio de Boudins ne me convient pas entièrement à ce niveau-là parce qu'il manque toujours un back-up. Même avec des cyclistes chevronnés sur le Tour de France, il y a toujours des voitures qui suivent le cortège en cas de blessure et là, si l'une des trois s'était blessée au point de ne plus pouvoir pédaler, elles auraient fait quoi? J'ai du mal à croire que des parents n'auraient pas envisagé cette éventualité, surtout avec des ados qui ne s'entrainaient que depuis peu de temps avant d'entreprendre un trajet aussi long. Peut-être que la journaliste aurait pu les suivre en voiture? Je ne sais pas, j'aurais au moins aimé que l'éventualité soit évoquée, quitte à ce que Mireille réponde qu'il y aurait la place dans le pick-up pour une personne et son vélo en cas de pépin. Ceci dit, c'est FUN. Déjà, au niveau de l'idée, j'aime que ces trois jeunes femmes décident qu'être un Boudin ne suffit pas à les définir et qu'elles prennent des initiatives pour se réapproprier ce nom insultant et en faire une force. Et sur la route, il leur arrive des aventures rocambolesques, dont le récit ponctué par les pensées humoristiques de Mireille donne un résultat parfois très drôle. La voix de Mireille réussit à rendre un voyage à vélo et la vente itinérante de boudin intéressants, et c'était pas gagné. La scène où elle se regarde dans un miroir après un relooking m'a fait éclater de rire parce que c'est le but, je pense: se moquer des clichés et montrer qu'on peut aussi rigoler et être l'héroïne de sa propre histoire, même si on est grosse, même si on a de l'acné, même si on ne ressemble en rien aux mannequins dans les magazines. Et c'est rafraichissant de voir ça, même si l'intrigue a quelques faiblesses. Ce qui m'a le plus marquée, je pense, c'est que j'ai trouvé l'évolution des personnages très limitée. Le peu qui arrive n'arrive que sur la fin, et pas pour tout le monde. Il n'y en a que pour Mireille et ceux qui gravitent presque exclusivement autour d'elle, comme Kader, Malo et Klaus (et encore, c'est vite fait). Quid d'Astrid et Hakima? Pas grand chose. Les deux acolytes de Mireille sont à peine plus que des figurantes, j'ai l'impression. Et c'est bien dommage, parce que ce voyage est aussi leur voyage, et je trouve qu'elles auraient mérité d'en tirer un peu plus que ce qu'elles y ont gagné. Spoilers! Je ne peux pas dire que Mireille m'ait été particulièrement sympathique. Elle cache beaucoup de ses propres blessures derrière une attitude assez rude avec son entourage et de l'humour au timing souvent malheureux. Le fait que Hakima ait quasiment peur d'elle me chagrine. J'imagine que si elle n'ose pas demander à Mirelle de s'arrêter quand elle ne va pas bien, c'est en grande partie dû à sa propre timidité, son besoin de ne pas attirer l'attention, faire de vagues, mais je pense aussi que Mireille l'intimide et malheureusement, même quand ce fait est exprimé, Mireille ne corrige pas vraiment son attitude. Je l'aurais probablement plus appréciée si on avait eu droit à quelques scènes où elle laissait ses compagnons de voyage entrevoir les fissures dans son armure. Elle m'aurait paru plus humaine et moins insensible. Parce qu'elle n'a pas un mauvais fond, même si elle a une mauvaise attitude (en particulier envers son beau-père (et je comprends, j'ai eu la même pendant mon adolescence)). Elle a tout de même le mérite d'être réaliste. J'apprécie tout particulièrement que le béguin de Mireille pour Kader n'aille pas plus loin. C'était mignon à lire, d'autant qu'on craque direct pour Kader par procuration, mais Mireille est une ado et Kader a 26 ans, donc je suis contente que ça n'ait pas viré à la relation amoureuse. Par contre il a mon âge à quelques années près, donc s'il est basé sur une personne réelle, je veux bien son numéro. Et donc la fin. Et là, OK, je prends sans réserve. La courte interaction entre Mireille et son père biologique est exactement ce que j'espérais et plus encore. Mireille se rend compte que parfois, l'histoire est plus complexe que la vision qu'elle en a, que Klaus n'est pas foncièrement mauvais, qu'il a ses propres problèmes... et prend la décision altruiste de ne pas détruire sa vie. Sa soudaine acceptation de son beau-père en découle mais surtout, on apprend qu'elle est principalement venue pour sa mère, et donner son manuscrit à Klaus pour qu'il le lise, voire l'aide à être publié. Et c'est le moment de grâce à mes yeux. Mireille renonce à la colère et au sentiment d'abandon qu'elle a trainés pendant presque toute sa vie et c'est magnifique à lire. Bref, ce n'est pas parfait mais c'est léger, c'est fun et ça se dévore. À lire tranquillou pilou sur la plage pour un bon moment de détente. Ma note 6/10. Il y a de l'idée et c'est fun, mais je pense que la légèreté du roman m'aurait plus plu si elle avait été équilibrée grâce à une exploration des personnages plus poignante.
0 Commentaires
Laisser une réponse. |
Prochains articles:
White Smoke, de Tiffany D. Jackson.
Nos Jours Brûlés, de Laura Nsafou, en lecture commune avec:
Cadeau Muhayimana Moune La Booktillaise pour le Café Lithéraire Oddball, de Sarah Andersen.
Exemplaire numérique envoyé par Andrews McMeel Publishing (merci à eux!) Catégories
Tous
Archives
Décembre 2022
|