J'attends cette collaboration depuis l'année dernière, sans rire. J'ai précommandé la version anglaise plus de six mois avant sa sortie. Alors quand j'ai su que Hachette publiait une version française dans la foulée, je ne pouvais pas passer à côté de l'occasion d'écrire un article. Un grand, grand merci à Hachette pour m'avoir fourni un exemplaire de ce roman en échange d'une critique honnête. Évidemment, sa provenance n'affecte en rien mon opinion. Ben c'était très chou, mais plutôt plat. Concrètement, j'ai l'impression qu'il ne s'est quasiment rien passé une fois que Ben et Arthur se sont retrouvés et que leur romance manquait un peu de mouvement. Il y a trois parties et un épilogue, toutes avec un titre, comme le roman d'ailleurs, tiré de la chanson Only Us, de la comédie musicale Dear Evan Hansen. Je ne pense pas que ce soit un hasard vu que Dear Evan Hansen et l'amour d'Arthur pour les comédies musicales sont mentionnés dans le roman. La première dure environ un tiers du livre et raconte la rencontre d'Arthur et Ben, ainsi que les différentes manières dont ils se recherchent l'un l'autre. Il faudra attendre le dernier chapitre de cette partie pour qu'ils se retrouvent mais j'ai apprécié le côté "occasions manquées", comme avec Craiglist. C'était frustrant, mais dans le bon sens, où on se dit "oh mince, ils ont failli se retrouver!" et on se demande quelle sera la prochaine piste. Surtout qu'on les suit tous les deux, alors on les encourage, on hurle de frustration quand ils font un pas en arrière, on espère en murmurant "va par là, il est là-bas!!!" ou "noooooooon c'est pas le bon!!!" et même s'il n'y a pas vraiment de suspense (merci le synopsis), j'ai trouvé cette partie vraiment sympa à lire. Becky Albertalli a écrit les passage d'Arthur Seuss et Adam Silvera a écrit ceux de Ben Alejo. Et oui, les initiales échangées, c'est fait exprès. Le style d'Albertalli se reconnait dès les premières pages, dans sa manière d'écrire ses phrases et dans ses références. Le style de Silvera, par contre, ... Il écrit très bien aussi, même si je ne suis pas hyper sensible à ses romans, mais j'ai trouvé sa patte très discrète, même un peu trop, par rapport au style de Becky Albertalli, qu'on reconnait d'emblée. Je trouve ça dommage parce qu'il aurait pu faire un excellent contrepoids à la mignonnitude d'Albertalli avec son style plus doux-amer, et finalement, j'ai eu l'impression de lire un livre de Becky Albertalli avec quelques touches d'Adam Silvera dans le personnage de Ben. J'aime bien Albertalli, hein, c'est juste que j'espérais quelque chose de plus équilibré entre les deux auteurs. Les fans de Becky Albertalli seront probablement ravis de lire Pourquoi pas Nous?, ceux d'Adam Silvera, par contre, je ne sais pas trop. Un élément de logistique m'échappe un peu. Arthur croit un moment que Ben est en fait Hudson parce qu'il n'a récupéré que la moitié du bordereau d'envoi du colis et ne sait pas si Hudson est le nom de l'expéditeur ou du destinataire. Mais comment c'est possible? Outre le fait que les bordereaux américains indiquent clairement "To" et "From", si l'étiquette est déchirée en deux (et j'ai vérifié dans ma copie en V.O., le texte dit bien "rips it in half", pas en plusieurs morceaux), il suffit de la comparer avec un bordereau entier. Apparemment, l'expéditeur est en haut et le destinataire en bas. Donc si la partie qu'Arthur a ramassé est déchirée en bas, c'est la partie du haut, donc l'expéditeur. Si elle est déchirée en haut, c'est la partie du bas, donc le destinataire. Si elle était déchirée dans le sens de la hauteur, il aurait eu les deux noms, et pareil, il aurait suffi de comparer pour savoir qui était l'expéditeur et qui était le destinataire. Désolée mais ça me perturbe. Soit j'ai tout faux, soit, pour un mec qui essaye de stalker un peu un inconnu pour le retrouver, Arthur n'est pas très futé. Spoilers!L'intrigue est pour ainsi dire inexistante, le roman repose entièrement sur les deux personnages principaux et l'évolution de leur relation. Arthur est chou, même si vous pouvez vous attendre à pas mal d'embarras par procuration avec lui. Il dit ce qu'il ne faut pas quand il ne faut pas, il est maladroit et il frôle dangereusement la ligne entre adorkable et juste ridicule. Dylan et Samantha sont mes préférés, personnellement, mais les personnages secondaires sont tous bien écrits et ma scène préférée doit être le dîner avec les parents. Par contre, je regrette qu'il n'y ait pas de réel rebondissement dans l'intrigue. Les seuls problèmes dans les relations des personnages sont des non problèmes. Dylan a appelé Samantha sa "future épouse" devant elle et elle a flippé. Arthur a fait un scandale parce que Ben était en retard (et oui, il y avait de quoi faire salement la tronche parce que ça leur a coûté des tickets pour Hamilton). Ben a omis de mentionner que son ex suivait des cours de rattrapage avec lui et Arthur a pété un plomb alors que RIEN ne pourrait laisser penser que Ben a toujours des sentiments pour Hudson. ÇA, ça aurait été un vrai motif de rupture. Que Ben ne lui ait pas dit que Hudson suivait aussi les cours d'été et n'ait pas supprimé ses photos de son compte Instagram, ce n'était qu'une broutille, amplifiée par l'insécurité d'Arthur. Il y a UNE courte scène d'homophobie dans le métro, à part ça, leurs quelques "problèmes" me paraissaient vraiment exagérés et pas le moindre rebondissement en vue. J'ai apprécié le parallèle avec le rattrapage du lycée. Le thème de la seconde chance se retrouve un peu partout, dans les cours d'été de Ben, chez Arthur qui refait son coming out pour ses amis, avec Dylan et Samantha qui n'abandonnent pas leur relation après un raté ou deux, avec Hudson et Harriett qui essayent de reformer le groupe d'amis qu'ils avaient auparavant, ... Je suis contente que les auteurs aient poussé leur idée et n'aient pas limité leur thème à la relation de Ben et Arthur. Ce n'est certes pas hyper palpitant au niveau action, mais c'est un roman qu'on lit pour ses personnages et la manière dont ils se complètent, et à ce niveau-là, je trouve que Pourquoi pas Nous? est vraiment intéressant. Tout le monde ou presque a sa seconde chance à quelque chose, et c'est bien parce que qui n'en voudrait pas une, dans sa vie? J'aime l'idée que si on se donne du mal pour obtenir une seconde chance, l'univers nous en offrira une. J'ai envie d'être aussi optimiste qu'Arthur. La grande question, évidemment, concerne la fin. Albertalli adore les fins heureuses, Silvera préfère arracher les cœurs, de quel côté la fin du roman va-t-elle pencher? Je dirais là aussi que c'est déséquilibré entre les deux, au profit de Becky Albertalli. La rupture de Ben et Arthur aurait dû rendre la fin un peu triste, même si l'espoir restait entièrement permis, mais je n'ai même pas eu la larme à l’œil. On en a vraiment fait quelque chose de très joyeux alors que ça reste une rupture, donc j'ai trouvé le ton un peu décalé. On aurait pu garder la rupture en la laissant tristounette à la Silvera et terminer sur l'épilogue à l'Albertalli, ouvert qui laisse espérer un happy ending pour plus tard, une troisième chance pour Arthur et Ben, peut-être. Je trouve que le contraste entre le doux et l'amer n'était pas assez marqué à mon goût. Ceci dit, je trouve la fin plausible et reposante pour mon pauvre petit cœur malmené, donc ça reste tout à fait honorable. Pourquoi pas Nous? n'aura aucun mal à trouver son public. C'est très mignon, c'est léger, ce serait parfait à lire sur la plage ou au bord de la piscine, au soleil. Ma note 6.5/10. C'est mignon à souhait et les personnages secondaires sont aussi attachants que les principaux. Ceci dit, je trouve que l'influence de Becky Albertalli a un peu phagocyté celle d'Adam Silvera et que le roman manque de réel conflit.
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