Publication prévue le 09 Mai 2018. Merci beaucoup à Rageot et NetGalley de m'avoir envoyé un exemplaire de ce roman. Sa provenance n'influence en rien mon opinion. J'ai trouvé ce court roman (160 pages) très sympathique, même si je lui ai trouvé deux défauts majeurs. Déjà, j'ai beaucoup aimé l'histoire de Hetseni. J'ai trouvé que c'était un personnage très attachant et son évolution au cours du roman était très bien menée. Je reconnais que j'ai toujours un peu peur des romans courts parce que je me demande toujours s'il y aura la place de ne pas se précipiter de ce côté-là, mais non. Du jeune garçon, du ka’êškone (j'ai vérifié ce mot dans un dictionnaire de Cheyenne, d'ailleurs), un peu trouillard et écrasé par son père, il devient un jeune homme plus sûr de lui et de sa place dans le monde. Son histoire ne présente aucun défaut, son évolution est progressive, cohérente, et je suis persuadée que tous les lecteurs l'apprécieront énormément. Louise, malheureusement, ne jouit pas du même privilège. Contrairement à ce que je pensais, on n'a pas deux histoires parallèles. On est carrément dans la métafiction, avec Louise qui communique avec Jonas/Hetseni tout au long du roman. C'est spécial, et très honnêtement ça ne ne me parait pas nécessaire vu le peu d'influence que Louise et Hetseni ont l'un sur l'autre. C'était l'idée de base de l'auteur, ce que je comprends, et c'est effectivement un concept intéressant, mais je n'ai pas l'impression que ça ait fait avancer le roman ou les personnages d'une quelconque manière. Louise lit les aventures de Hetseni, interagit avec lui, le rêve de n'importe quel lecteur, mais ce qui aurait pu changer leur vie à tous les deux n'a absolument aucune incidence sur les évènements. C'était juste là, et du coup, ça m'a paru superflu. Je pense qu'il y aurait eu la possibilité d'intégrer cet élément de manière plus naturelle et plus significative. Face au contexte historique et culturel du roman, j'ai bien évidemment pensé à demander quelles recherches l'auteur avait faites pour l'écrire. La culture Cheyenne est omniprésente, la langue aussi, ça me paraissait donc essentiel que l'auteur ait fait ses devoirs et ne présente pas une peinture fausse d'une minorité. L'auteur confirme avoir fait des recherches pour coller au maximum à la réalité, mais avoir inventé le langage, à l'exception de quelques mots qu'elle a cherchés dans un dictionnaire de Cheyenne (comme ka’êškone, par exemple). Et là je me retrouve face à un gros cas de conscience: l'auteur écrit sur les Cheyennes, sans l'être, et visiblement sans avoir consulté quelqu'un qui le soit, sans quoi les dialogues n'auraient pas eu besoin d'être inventés. Représenter correctement une culture, et quand je dis "culture", j'inclue la langue, n'est pas une tâche facile et demande énormément de recherche et de délicatesse pour ne pas présenter de stéréotypes racistes. Là, ce qui me dérange, c'est que je ne sais pas. Il n'y a aucun avertissement au début du roman comme quoi la langue est inventée, aucune indication qu'il a été lu et validé par une personne qui pourrait être offensée par une mauvaise représentation, rien. Et avant qu'on ne me réponde "mais c'est de la fiction, évidemment que c'est inventé!", non. Les Cheyennes existent, cette fiction est basée sur une vraie tribu. Si l'auteur voulait inventer, elle pouvait inventer une tribu amérindienne fictive mais elle a choisi d'écrire sur les Cheyennes, donc les recherches ne sont pas une option, surtout qu'elle n'était pas obligée d'inventer les phrases. Un simple "Machin m'a parlé dans une langue que je ne connais pas" aurait suffi, et ça aurait eu le même effet, vu que les phrases ne sont pas traduites en notes. Donc qu'est-ce que ça aurait coûté, de ne pas inventer des phrases qui sonnaient Cheyennes? Pas plus que de ne pas écrire "ching chang chong" dans la bouche d'un personnage chinois. J'ai trouvé ça très maladroit, même si je tiens à préciser que l'auteur a été on ne peut plus franche à ce sujet. Spoilers! Je suis vraiment déçue que Louise ne profite pas du tout de l'histoire. Alors que Hetseni vit sa vie entre leurs interactions, tout ce que Louise fait, c'est penser à Matthias et à la prochaine fois qu'elle pourra lire le manuscrit de son père. Elle n'agit pas. Elle n'évolue absolument pas entre le début à la fin. La seule chose qui change, c'est l'arrivée de Matthias dans sa vie, et très honnêtement, je trouve qu'elle méritait mieux. Vu la longueur du roman, on pouvait largement ajouter quelques pages à lui consacrer, pour qu'elle puisse être développée un peu aussi, et sortir de l'histoire grandie, comme Hetseni. J'ai été surprise que Hetseni et son compagnon "d'infortune" retrouvent leurs parents. Je ne m'y attendais pas, mais pourquoi pas. Oui, ça fait un peu happy ending bisounours, mais dans un livre jeunesse, ça ne me choque pas et c'est fait sans en faire des caisses donc on ne se noie pas dans la guimauve. J'apprécie l'intention de ne pas rendre ça complètement sirupeux. Pareil pour la romance avec Zach et Sicheeda, c'est dit mais sans fioritures, ce qui est un très bon point. Finalement, j'ai trouvé l'histoire de Hetseni très agréable à lire, mais j'aurais préféré que Louise ait sa propre histoire en parallèle. Ma note 6.5/10. L'auteur sait visiblement écrire, et j'ai beaucoup aimé l'histoire de Hetseni, mais je trouve Louise un peu trop négligée et moi qui ai l'habitude des romans Own Voices, je ne peux décemment pas laisser passer le cafouillage sur la langue Cheyenne. Je recommande quand même parce que c'est un bon roman, mais ajouter un avertissement au début du roman pour préciser ce qui est inventé et ce qui ne l'est pas me parait être le minimum vital quand on invente des éléments d'une culture qui existe.
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