Le calcul est simple: Anthologie + Edgar Poe + Young Adult = j'achète. J'adore les anthologies et j'étais très curieuse de lire ce que ces réécritures allaient donner. Le fait que plusieurs des auteurs participants ne m'étaient pas inconnus était la cerise sur le gâteau. Je suis très contente de ma lecture, au point que j'ai même acheté d'autres romans écrits par certains auteurs de l'anthologie pour mieux découvrir leur travail. Parce que finalement, ce que j'ai eu le plus de mal à lire, ... ce sont les nouvelles de Poe. Oui parce que je tiens à le mentionner: les nouvelles originales de Poe se trouvent dans le livre. On a une première moitié avec les réécritures, puis une seconde moitié avec les textes qui les ont inspirées. J'ai trouvé que c'était une touche sympa, parce que même si j'en avais lu la plupart, il m'en manquait quelques unes et ça m'a évité de devoir fouiller mes cartons à la recherche de mes (Nouvelles) Histoires Extraordinaires. Pour ma lecture, j'ai choisi d'alterner entre les nouvelles originales et les réécritures, pour pouvoir apprécier la version moderne avec l'originale bien fraiche en tête, mais chaque lecteur peut choisir l'organisation qui lui convient le mieux, ou même ne pas lire les nouvelles originales s'il les connait déjà, ou si elles ne l'intéressent pas. Chacun sa méthode. J'aime bien quand on dépoussière des grands classiques. Je trouve que ça permet à de nouvelles générations de découvrir des histoires cultes mais aussi que les lecteurs des textes originaux peuvent aimer comparer l'original et la réécriture. C'est quelque chose que j'adore, et je parle de réécritures au sens large, donc cinéma, télévision, podcasts, ... Bref, tous médias inclus. Comparer les adaptations et examiner les différences, c'est une de mes lubies. En ce sens, cette anthologie est parfaite, parce qu'en plus de reprendre des classiques de Poe, chaque nouvelle est reprise par un auteur différent, donc chaque réécriture a son propre style et son propre univers. On se retrouve face à une diversité importante de textes en partant d'un seul auteur et ça m'éclate complètement. Bien sûr, qui dit "anthologie" dit "œuvres individuelles", donc comme d'habitude avec les anthologies, j'ai écrit mes impressions sur chaque texte: She rode a horse of fire, réécriture de Metzengerstein par Kendare Blake. Je reconnais que je n'ai pas vraiment compris cette nouvelle. Ce n'est pas du tout la faute de Kendare Blake, sur ce coup-là: je n'avais déjà pas compris celle de Poe. L'enchainement des évènements me laisse perplexe et pour être tout à fait franche, remplacer un cheval par une voiture, ce n'est pas la modernisation la plus innovante de la littérature. J'ouvre donc le bal avec un mini flop. La nouvelle que Blake a écrite pour Slasher Girls & Monster Boys m'avait beaucoup plus convaincue. Next. 2/10. It's Carnival!, Tiffany D. Jackson revisite The Cask of Amontillado. J'adore celle-ci. Sans cautionner les actions du personnage principal au regard de l'offense, je trouve l'intrigue parfaitement respectée et modernisée, au point qu'elle pourrait être lue et appréciée sans avoir connaissance de la nouvelle originale. Elle se suffit à elle-même. J'apprécie particulièrement le fait que Tiffany Jackson ait choisi le métissage des origines de son personnage comme sujet des insultes qu'elle subit, parce que c'est une problématique actuelle et importante. Top! 9/10. Night-Tide, Annabel Lee façon Tessa Gratton. J'ai beaucoup aimé. Le poème de Poe est plutôt court mais donne un squelette de trame que Tessa Gratton a su étoffer avec beaucoup de délicatesse, je trouve. Night-Tide confirme aussi ce que j'avais pensé de Strange Grace: la plume de Gratton est très belle, mais je l'apprécie plus par petites doses. Moi qui ne suis pas fan de poésie de manière générale, j'ai trouvé cette nouvelle toute en sensibilité, mesure et délicatesse. Bravo pour avoir réussi à apposer sa patte sur un texte aussi connu. 10/10. The Glittering Death, Caleb Roehrig réécrit The Pit and the Pendulum. The Pit and the Pendulum n'est pas la nouvelle la plus facile à réécrire, il faut bien l'avouer. Je trouve que Roehrig, en étoffant le concept, s'est rendu un fier service, parce que même si l'intrigue s'éloigne un peu de la nouvelle de Poe, elle est suffisamment consistante pour être viable. Je ne pense pas que ça aurait pu être le cas s'il avait collé plus près à l'originale. J'aime particulièrement qu'on insiste sur le fait que le meurtrier est un malade et que rien, absolument RIEN, ne justifie ses actions. Ce n'est pas la faute des victimes s'il s'en prend à elles, elles sont juste au mauvais endroit au mauvais moment, ce qui leur vaut l'attention d'un homme dérangé dont le jugement n'a aucune valeur. J'aime le texte, j'aime l'idée. 8/10. A Drop of stolen Ink, The Purloined Letter revu par Emily Lloyd-Jones. Petit coup de cœur pour celle-ci, qui dépoussière complètement la nouvelle d'origine. Déjà, le concept même des tatouages est intrigant. C'est imaginatif mais suffisamment bien expliqué pour qu'on comprenne les enjeux, même dans un texte aussi court qui n'a pas beaucoup de temps à consacrer à de l'exposition. J'aurais quand même aimé découvrir ce qu'un tel univers aurait pu offrir comme possibilités dans un roman, ce qui me rend curieuse des autres travaux d'Emily Lloyd-Jones. Bref, imaginatif et surprenant. 9/10. Happy Days, Sweetheart, par Stephanie Kuehn. Stephanie Kuehn frappe encore. J'avais adoré sa nouvelle dans Feral Youth et celle-ci tape encore en plein dans le mille. La réflexion sur le privilège, la relation entre le personnage principal et Lucas, le twist de la fin, je suis hyper fan. Il faut vraiment que je commence à lire ses romans, parce que s'ils sont aussi bons que ses nouvelles, je vais me retrouver à genoux.C'est actuel, c'est moderne, c'est fidèle mais complètement retourné, une belle bouffée d'air frais avec une once de ténèbres, c'est carrément ma came. Et c'était gonflé, parce que pour reprendre le Cœur Révélateur, il faut un sacré culot. 10/10. The Raven (Remix), par Amanda Lovelace. Le concept est original et donne lieu à une histoire différente mais très courte. Ça passe ou ça casse, mais il faut bien reconnaitre que c'était gonflé. Trop court pour être noté, ceci dit. Changeling, Marieke Nijkamp reprend Hop-Frog. Honnêtement, je ne suis pas très fan. Je pense que c'est la plume de Nijkamp qui ne me convient pas, parce que la réécriture était plutôt sympa. Je pense que Changeling a aussi souffert du fait que Hop-Frog n'est pas une nouvelle dont je garde un souvenir impérissable. Meh. 4/10. The Oval Filter, Lamar Giles Instagramme le Portrait Ovale. Si vraiment je voulais chipoter, je pourrais éventuellement reprocher qu'à part le portrait vivant d'une jeune femme morte, il n'y a pas vraiment de rapport entre la nouvelle originale et la réécriture. Mais la version de Lamar Giles est tellement géniale que je ne peux pas lui en tenir rigueur. J'aime que la jeune femme du portrait aide à résoudre son propre meurtre et à obtenir justice, j'aime que les préjugés soient adressés, j'aime l'attitude du personnage principal. Dans l'ensemble, Giles a repris le Portrait Ovale et en plus de l'actualiser, lui a donné une raison d'être. Je suis ravie. 9/10. Red, The Masque of the Red Death revu par Hillary Monahan. Version moderne et racontée du point de vue de la Mort Rouge. C'est audacieux et ça fonctionne très bien. Je n'ai rien à dire tellement c'est efficace et propre. J'achète, comme dirait l'autre. 9/10. Lygia, par Dahlia Adler. J'attendais beaucoup de Lygia parce que j'avais étudié Ligeia pour mon mémoire de Master 1. C'est une nouvelle que je connais bien et que j'apprécie particulièrement, donc mes attentes étaient élevées. Adler délivre sans problème. Je pense que Lygia est une de mes nouvelles préférées de l'anthologie. La réécriture, bien que beaucoup plus moderne, suit parfaitement l'intrigue originale et je trouve que le format, avec la narratrice qui s'adresse directement à Lygia, fonctionne très bien. La fin est géniale et je n'ai aucune critique à formuler. J'adore. 10/10. The Fall of the Bank of Usher, par Fran Wilde. Oh yeah. J'aime énormément ce que Fran Wilde a fait d'une nouvelle qui ne fait pas partie de mes préférées. Le résultat dépote. Le côté informatique/intelligence artificielle modernise instantanément l'intrigue, qui regorge de clins d’œil et de parallèles avec la nouvelle originale tout en développant sa propre identité. L'univers m'intéresse beaucoup, et comme avec A Drop of Stolen Ink, je regrette presque que ce ne soit pas un roman tout entier. 9/10. The Murders in the Rue Apartelle, Boracay, Rin Chupeco emmène la rue Morgue aux Philippines. Et on termine avec une autre réussite. On retrouve les éléments principaux de la Rue Morgue: un acolyte du narrateur d'une clairvoyance impressionnante, le double meurtre, les témoignages des voisins, l'enquête des personnages à la Sherlock et Watson, ... On ajoute à ça un élément de romance entre les deux protagonistes, une identité trans, des créatures mythologiques et un coupable inattendu. Honnêtement, je pense que le surnaturel était de trop. L'intrigue était déjà suffisamment consistante et tenait la route sans qu'on ait besoin d'ajouter des créatures dont l'existence apparemment connue du public n'est pas expliquée. Ceci dit, la nouvelle est trop intéressante en comparaison pour que ça me dérange vraiment. 9/10. Ma note Je pense que je peux donner 8.5/10. C'est une anthologie de qualité que je recommanderais avec plaisir à qui aime Poe ou à des lecteurs rebutés par les classiques. En plus, c'est un beau livre, avec les histoires originales dedans, donc je me dis qu'il ferait sûrement un chouette cadeau à un(e) fan de Poe. Le mois prochain Leigh Bardugo a publié son premier roman pour adultes: Ninth House. Des évènements occultes dans une sororité de fac, je suis plus que partante!
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